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MON OEIL SUR L'ACTUALITE

4 juillet 2010

Le bouclier fiscal, une aiguille dans le bouclier social

L’histoire du bouclier fiscal n’est pas récente, elle ne date pas non plus de 2007, année de l’élection de Nicolas Sarkozy. L’idée de ce bouclier peut se résumer à cette citation de Laffer « trop d’impôts, tue l’impôt ».

D'abord  le bouclier fiscal est un dispositif qui permet de limiter à 50% de son revenu fiscal de référence la somme constituée de l'I.S.F., de l'impôt sur le revenu, des prélèvements sociaux et des taxes locales relatives à l'habitation principale. Pour chaque contribuable il y a donc un rapport avec au numérateur le revenu fiscal de référence et au dénominateur la somme qui vient d'être détaillée.

 

On remarque alors que la vérité générale consistant à dire que les riches ne paient pas d'impôt sur le revenu grâce aux niches fiscales tout en bénéficiant du bouclier fiscal est assez contradictoire. Car pour bénéficier du bouclier fiscal le contribuable a "intérêt à payer le maximum d'impôts" ! Avec un impôt sur le revenu égal à 0, le contribuable enlève de facto un élément du dénominateur et enlève ses chances de bénéficier du bouclier fiscal. A moins d'avoir un énorme patrimoine générant un énorme I.S.F.... Mais là encore cela n'est pas très cohérent. Car l'énorme patrimoine va le plus souvent générer de gros revenus et donc de l'impôt sur le revenu. Il faut rappeler de plus que la plupart des niches fiscales sont plafonnées, souvent non reconductibles (il est rare que l'on installe une pompe à chaleur chaque année) et constituent toujours une sortie d'argent pour le contribuable ce qui profite à l'activité économique. Cependant il est des situations où l'impôt sur le revenu est faible et où l'I.S.F. est important : il s'agit par exemple du fameux retraité de l'Ile de Ré qui a une petite retraite, classé sans complexes dans la catégorie des très très riches du fait de la valeur de sa résidence principale. On note que ce très très riche n'a pas besoin de niches fiscales pour payer un impôt sur le revenu faible ou inexistant.

 

On dit aussi que les pauvres ont une propension à consommer plus importante que celle des riches, en appliquant les enseignements de Keynes. Ainsi cet argent dépensé pourrait être donné aux plus démunis au nom de la justice sociale. Il est vrai que si on distribuait la somme allouée au bouclier fiscal aux 8 millions de personnes qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté, elles auraient 6 euros de plus par mois pour vivre, de quoi relancer la consommation de manière avantageuse... 

 

 

Sauf que le constat économique dit autre chose : le niveau de la consommation des Français est très haut et résiste même à la crise économique. En revanche la France est en panne du fait d'un sous-investissement chronique, qui nous vient d'avant la crise. Or pour plagier Keynes, les plus favorisés ont une propension à investir plus importante que celle des plus modestes. On a donc besoin que les Français qui en ont les moyens investissent fortement. Cela vaut non seulement pour ceux qui bénéficient déjà du bouclier fiscal, mais cela vaut surtout pour ceux qui ont les moyens d'investir, qui ne bénéficient pas aujourd'hui du bouclier fiscal, et qui se disent qu'en investissant ils ne devront pas payer plus de 50% de ce qu'ils ont gagné. Je note sur  ce point que tous les pays qui nous entourent l'ont compris. Ainsi le gouvernement socialiste espagnol a décidé dans son plan de relance de supprimer l'I.S.F.... La France est donc le dernier grand pays d'Europe à avoir l'I.S.F., sans doute parce que la France fait toujours mieux que les autres.

 

S'agissant des plus pauvres, fortement secoués par la crise, ce débat laisse à penser que l'Etat les a abandonnés. Oui parce que Nicolas SARKOZY et l'U.M.P. n'aiment que les riches. Pourtant cette caricature ne résiste pas à l'épreuve des faits. D'abord la moitié des contribuables ne paient pas l'impôt sur le revenu, 25% des contribuables sont exonérés de taxe d'habitation (bénéficaires de minimum vieillesse, R.S.A. etc) et 25% paient une taxe d'habitation allégée du fait de leurs revenus. Il faut rappeler que lorsqu'on est exonéré de taxe d'habitation, on est également exonéré de redevance télé... Il existe donc des boucliers fiscaux qui ne veulent pas dire leur nom. Je note au passage que demander aux Français à l'occasion de sondages, dont la motié ne paie pas l'impôt sur le revenu, s'ils sont pour que leurs voisins dit riches en paient plus, est un peu, comment dire, particulier...

 Mais il est vrai que l'Etat n'aide pas les plus modestes. Non. Sauf que 20% des Français, les plus pauvres, bénéficient de 60% du montant des prestations sociales (familiales, logement et minima sociaux) selon un rapport du Sénat. Or ce total est d'à peu près 80 milliards d'euros. Notre Etat, qui n'aime pas les pauvres, distribue donc chaque année 48 milliards d'euros à 20% de la population, encore une fois la plus modeste. Il est fait remarquer ici qu'on ne parle pas des retraites, des allocations chômage ou encore des dépenses de santé. Si on devait tout sommer cela représenterait au passage 550 milliards d'euros, soit plus d'un tiers de notre P.I.B. ou de notre création de richesses.

A cet Etat n'aimant pas les pauvres, qui ne pratique aucune redistribution, faut-il rappeler que le plan de relance de l'économie a permis d'augmenter certaines prestations ou encore de supprimer le deuxième tiers et le solde pour l'impôt sur le revenu de la 1ère tranche ? Non, ce n'est pas la peine. L'Etat préfère les riches, en leur donnant 600 millions d'euros dans le cadre du bouclier fiscal.

600 millions d'euros pour les riches ? Cette donnée du problème maintes fois entendue ou lue dans les médias est une absurdité qui a pris le statut de vérité. Pourtant la vérité est ailleurs...

60% des bénéficiaires du bouclier fiscal ne paient pas l'I.S.F.. Mieux, le bouclier fiscal bénéficie aux plus modestes d'entre nous. Prenons un exemple simple pour bien comprendre : un célibataire, 50 ans, dans la classe moyenne, propriétaire de son logement. Il perd son emploi et malheureusement du fait de la conjoncture il arrive en fin de droit. Il bénéficiera cependant d'une aide type R.S.A. qui l'exonérera de la taxe d'habitation. Sauf que la taxe foncière devra être payée ! Comme le R.S.A. est non imposable et comme notre Français n'a pas d'autres revenus par ailleurs, son revenu fiscal de référence sera nul. Il bénéficiera néanmoins du bouclier fiscal s'agissant de la taxe foncière. Comme on le voit la classe moyenne n'est donc pas abandonnée. En cas d'accident de la vie (chômage, accident du travail pour un indépendant, etc) le bouclier fiscal permet de faire face quelque peu et peut-être d'éviter de céder son logement pour pouvoir payer... une taxe foncière.

 En conclusion le débat d'aujourd'hui est particulièrement malsain. On essaie par tout moyen de diviser les Français, même de pointer du doigt des Français, dans une période où tous devraient tirer dans le même sens.

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